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Malgré les milliards de la PAC les agriculteurs ne s'y retrouvent pas.

Multipliant les actions de blocages et autres épandages de fumier, les agriculteurs français se plaignent du poids excessif des normes environnementales, "surtranspositions" du droit européen qui seraient parmi les plus sévères au monde alors même que les produits phytosanitaires continuent de nous empoisonner à petit feu (cancers, maladie de parkinson, malformations…). Sans parler des émissions de gaz à effet de serre.

Si ces normes étaient si efficaces on n'aurait plus besoin du bio !

Autrement dit ces normes "empoisonnent" les agriculteurs sans réussir ni à les protéger (ils sont les premières victimes des pesticides, cf L'agriculture empoisonnée Jean-Noël Jouzel et Giovanni Prete) ni à protéger les citoyens.

Efficace comme le plan éco-phyto initié en 2008 qui avait pour objectif de réduire de 50% l'utilisation de produits phytopharmaceutiques dans un délai de 10 ans et dont le résultat le plus probant a été l'augmentation continue de leur usage.

Certains produits sont bien interdits mais d'autres sont mis sur le marché dont l'innocuité n'est pas suffisamment prouvée (litote). De tels produits, hérités en grande partie des gaz de combat des tranchées, ne peuvent pas être anodins.

Dans le cadre des négociations avec le Mercosur on a appris que le Brésil par exemple utilise des produits interdits depuis 30 ans en Europe (Arte 28 minutes 30/01/24). Il y a pire ailleurs, on peut dormir sur nos deux oreilles ! Le Mercosur les écolos, les agriculteurs et jusqu'au gouvernement, tout le monde est contre sauf l'Europe, championne du libre-échange et de la concurrence soi-disant libre et non faussée….

Mais, parait-il, il ne faut pas non plus jeter tous les accords avec l'eau du bain. D'abord, avec sa balance commerciale hyper déficitaire, la France  a besoin d'exporter (et donc aussi d'importer car cela se fait souvent dans la réciprocité). L'accord avec la Nouvelle Zélande1, moyennant quelques ajustements, semblait être gagnant-gagnant. Sauf que le nouveau gouvernement de droite veut relancer l'exploitation sous-marine des hydrocarbures ce qui est contraire au traité qui devait respecter les accords de Paris…

Quid de la fameuse souveraineté alimentaire ? Pour certains c'est un mythe. On aura de toute façon toujours besoin d'importer thé ou café sauf à y renoncer au bénéfice de la chicorée (c'est délicieux !) mais au détriment des producteurs d'Amérique du sud.  En fait on peut très bien cultiver du thé dans nos belles contrées mais la production reste limi…tée.

Plutôt que de cesser toute importation il faut plutôt développer le commerce équitable, plus encore pour le cacao. Ce qui aura inévitablement un impact sur le pouvoir d'achat.

La souveraineté alimentaire n'exclue pas les exportations. En tout cas elle ne cesse de reculer : on importe un poulet sur deux, 56% de la viande ovine, 28% des légumes et 71% des fruits (vie-publique.fr 10/10/2022)…pas toujours très qualitatifs et en majorité de chez nos voisins européens. Quand j'entends un agriculteur prétendre que sa profession nourrit les Français, je rigole…Il y a donc une rude concurrence intra européenne.

Pour ce qui est de la production hexagonale de qualité, le label rouge, 15% de la production depuis 15 ans, ne progresse pas faute de demande. Les français sont prêts à débourser plus pour le poulet fermier du dimanche (la poule au pot d'Henri IV ?) mais pas en semaine…

Comme il faut réduire notre consommation carnée de 80 ou 90% on pourrait éliminer tout ce qui n'est pas label rouge et si besoin subventionner celui-ci même si réduire drastiquement notre consommation carnée permettra de toute façon de substantielles économies. Même si les courgettes ou la ratatouille en boite sont parfois aussi chères que certaines conserves contenant de la viande…

"80 ou 90% de baisse, il n’est pas bien celui-là !" C’est le but à atteindre mais on va y aller par étapes…

Pour le moment on entend plutôt parler de 50% et on entend aussi dire que la consommation de viande a baissé mais il semblerait qu'en fait elle a plutôt augmenté depuis 10 ans. Les Français achète peut-être moins de viande rouge dans les rayons des supermarchés mais en consomme plus au restau, etc. Il est difficile de se défaire de ses (mauvaises) habitudes. Dans l'autre sens, avant la 2ème guerre mondiale, il a fallu d'intenses campagnes de pub pour que les étatsuniens se mettent à consommer plus de  protéines animales lorsque leurs revenus ont augmenté (Benoit Daviron, Biomasse une histoire de richesse et de Puissance)…

En attendant il y a les choses qu'on ne fait plus sur place, par exemple les poulets sont envoyées en Espagne et reviennent en blanc de poulets (de mauvaise qualité ?) parce qu’on n’est plus capables de les faire nous-mêmes.

C'est dû à une forme de désindustrialisation agroalimentaire. Pour le travail du bois de même nos scieries n'ont pas toutes les capacités nécessaires.

Ce qui ne nous empêche pas par ailleurs de détruire aussi les filières de certains pays africains en y exportant à bas prix nos poules de réforme et du lait en poudre…

Idem pour les veaux qui partent et reviennent. Il y a des filières à reconstruire et à relocaliser en même temps que l'on organise la baisse de la consommation de viande.

Si la consommation ne baisse pas, la production en revanche, oui, induite par la baisse du cheptel qui entraine même des fermetures d'abattoirs. "En sept ans, le nombre de vaches a reculé de près d'un million de têtes pour descendre autour de sept millions." "On a perdu (…) deux millions de porcs…". (Les professionnels de la viande alertent sur la baisse de production, qui force la fermeture des abattoirs, Le Monde 20/02/2024). La production baisse aussi dans d'autres secteurs (légumes, fruits, volaille…) alors où est passé le grand méchant modèle productiviste dénoncé par les écolos ? Ils diraient que comme le système capitaliste destiné à s'autodétruire à la longue, le système agricole productiviste est également voué à l'échec car il est ultra concurrentiel (il y a des gagnants et des perdants), épuise les sols et les agriculteurs, etc.

Quand la production baisse et que la consommation, au mieux, stagne que se passe-t-il ? On importe !

Il y a un point qui n'est pas clair pour moi : les écolos accusent les éleveurs de bovins de pratiquer l'élevage intensif tandis que ceux-ci s'en défendent. Il est vrai qu'il n'y a pas en France de "ferme aux mille vaches". Les animaux vont tous, à un moment ou à un autre, brouter de l'herbe. Par contre ils peuvent être nourris en partie avec du soja produit au Brésil après déforestation…En revanche pour la volaille ou le porc il n'y a pas photo : l'élevage industriel existe bel et bien avec toutes ses conséquences : mauvais traitements, pollutions, etc...

Pour ce qui est du poison (oui du poison pas du poisson !) voyez les arrêts récents interdisant de boire l'eau du robinet dans nombre de communes en raison d'une pollution aux polluants éternels et aux métabolites de pesticides. On pourrait parler aussi des taux de manganèse, de nitrates ou de plomb dépassant, parfois de beaucoup, le seuil réglementaire. Un céréalier, Paul François, intoxiqué par des vapeurs d'herbicide, hospitalisé et souffrant toujours de troubles neurologiques. Après 15 ans de marathon judiciaire il a été indemnisé à hauteur de 11 000 € par Bayer-Monsanto qui a eu beau jeu, je suppose, de plaider la mauvaise utilisation ou l’erreur de manipulation du produit... et il y a l'affaire des eaux minérales contaminées commercialisées par Nestlé ou Alma qui ont dû subir des traitements interdits avec l'aval secret du gouvernement pour ne pas être impropres à la consommation…eaux qui par ailleurs contiennent deux fois plus de microplastiques que l'eau du robinet…  

Alors, oui, on marche sur la tête mais peut-être pas comme l'entendent les agriculteurs.

Par ailleurs ces normes peuvent effectivement pousser à bout certains éleveurs et il y en a une bonne illustration dans le film Albatros qui évoque le cas réel d'un jeune éleveur par ailleurs syndicaliste agricole qui a fini par craquer pour in fine après une cavale se faire tuer par les gendarmes.

Depuis la crise de la vache folle les pouvoirs publics ont une peur bleue d'un retour de la maladie et ont multiplié les obligations, déclaratives entre autres, chaque naissance de veau doit être dument déclarée dans les délais, etc. etc. Faute de quoi certains éleveurs sanctionnés se voient retirer leur troupeau la mort dans l'âme.

Autre paradoxe, les milliards de la PAC dont la France est la première bénéficiaire, se déversent à flots, malgré quelques ajustements environnementaux (les fameuses jachères…) surtout sur ceux qui disposant de grandes surfaces sont déjà gagnants mais aussi sur les éleveurs d’ovins et de caprins, les plus pauvres, qui eux en ont bien besoin, mais malgré cela certains agriculteurs vivent avec 500 ou 800 € par mois y compris à la retraite car la pension standard semble être de 800 et quelques euros. "La France fait de la baisse des revenus de ses agriculteurs la source de sa compétitivité quand l’Allemagne le fait par des gains de productivité." (Rapport sénatorial sur la ferme France).

Rappelons tout de même que certains agriculteurs s'en sortent et peuvent se permettre d'embaucher un salarié. Les AOP et autres AOC garantissent, en principe, un revenu décent. Il faudrait que toutes les productions soient AOP, AOC, IGP, STG, AB ou Label Rouge ! C'est ce qu'on appelle la montée en gamme (sauf que cette montée en gamme précisément a fait que le milieu de gamme a été squeezé par les productions étrangères et provoqué par exemple la faillite de Doux…). Mais quid du pouvoir d'achat ? Les Français ne sont pas prêts à revenir à une époque où les dépenses alimentaires représentaient 34, 6% (en 1960 contre 20,4% en 2014). Ils ont d'autres dépenses qui n'existaient pas : internet, téléphonie, chaines de streaming, etc.  La Sécurité Sociale Alimentaire que certains appellent de leurs vœux sera-t-elle à la hauteur (https://securite-sociale-alimentation.org/) ?

1 ["Les droits de douane seront supprimés dès le premier jour sur les principales exportations de l'UE telles que la viande porcine, le vin et le vin mousseux, le chocolat, les sucreries et les biscuits. Les agriculteurs de l'UE obtiendront des avantages allant au-delà des réductions tarifaires. L'accord protégera la liste complète des vins et spiritueux de l'UE (près de 2000 noms), tels que le Prosecco, la Polska Wódka, le Rioja, le Champagne et le Tokaji. En outre, 163 des produits traditionnels les plus renommés de l'UE (indications géographiques), tels que les fromages Asiago, Feta, Comté ou Queso Manchego, le jambon Istarski pršut, le massepain Lübecker Marzipan, les olives Elia Kalamatas, seront protégés en Nouvelle-Zélande. L'accord tient compte des intérêts des producteurs de produits agricoles sensibles de l'UE: plusieurs produits laitiers, viande bovine et ovine, éthanol et maïs doux. Pour ces secteurs, l'accord n'autorisera les importations à des taux de droit zéro ou réduits en provenance de Nouvelle-Zélande que pour des quantités limitées (au moyen de contingents tarifaires)."]

 

 

 

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