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Indochine - des Territoires et des Hommes, 1856-1956

Lundi 11 novembre, sous les canons de bronze, dans les douves, des photographies grand format montrent des personnalités qui ont participé au "ravivage" de la flamme du soldat inconnu. Après avoir traversé un jardin à la française, on accède aux colonnades où, déjà, des affiches illustrées introduisent à l'exposition, certaines réservées aux plus jeunes qui devront répondre à des questions telles que : cet objet est-il une jambe de bois, un porte-voix ou une ventouse ?

Dans un angle, trône un char Renault FT 17 en excellent état et dans un recoin un redoutable canon à mitraille.

Le musée des armées, situé dans l'enceinte de l'Hôtel des Invalides, abrite une exposition permanente sur le thème des deux guerres mondiales (1871-1945). Pourquoi 1871, alors qu'on ne peut ignorer, en ce jour anniversaire de l'armistice, que la première des deux guerres n'a commencé qu'en 1914 ? Cela a peut-être un rapport avec ce qui s'est passé en 1870...

L'histoire coloniale longue des rapports entre la France et ce qui allait devenir le Vietnam est exposée dans toutes ses facettes et commence, là aussi, bien avant 1856. " Dans le sillage des missionnaires portugais le Père jésuite Alexandre de Rhodes (né à Avignon) prêche au Tonkin puis en Cochinchine et finalise la romanisation du vietnamien", entre 1624 et 1646.

Le 28 novembre 1787 est signé le traité de Versailles au nom de Louis XVI et du roi de Cochinchine, le futur empereur Gia Long .

Anglais et Hollandais établissent par la suite des relations commerciales avec la péninsule puis la France cherche des points de ravitaillements entre Inde et Chine pour les navires de la Compagnie des Indes Orientales dont les navires partent de Lorient dès 1666 . Il devient alors impératif "de contrebalancer la grande influence anglaise".

Avant 1856 les royaumes indianisés du Cambodge et du Laos sont dominés par le Siam tandis que le Vietnam demeure dans l'orbite de la culture politique chinoise.Plus tard la Chine, qui doit protection au royaume, réagit vivement lorsque la France entreprend la conquête du nord de l'Indochine au Tonkin.

La Chine est aussi présente à travers des "bandes" (par exemple les Pavillons Noirs) qui parfois se mettront au service de l'occupant.

L'exposition se décline en quatre parties : - Les premiers pas - La formation de l'Indochine française - Au cœur de la colonie indochinoise - Déclin et fin.

La deuxième salle, de l'autre côté du palier, est plus grande que la première...

Des traités rédigés en idéogrammes raviront les passionnés de calligraphie et il y a aussi de quoi satisfaire les amateurs de vieux fusils, de même que ceux qui apprécient, en peinture, les scènes de batailles maritimes ou les portraits de généraux médaillés...des toiles qui ailleurs n'auraient peut-être pas beaucoup d'intérêt prennent ici un relief saisissant. On peut admirer un très beau code pénal annamite traduit par un Lieutenant de vaisseau - un livre grand format qui a pour sujet les "sauvages" (sic) de la rive gauche du Mékong - détester un extrait du discours de Jules Ferry sur le devoir civilisateur des "races supérieures" et apprécier la réponse de Clemenceau pour qui civilisation rimait toujours avec massacres ainsi qu'une lettre de l'officier Frédéric Garcin à son père offrant une parfaite illustration du point de vue de Clemenceau...

De très nombreuses photographies (celles de Willy Rizzo (1928-2013) par exemple), dont des autochromes aux couleurs étonnantes, et des films parfois inédits, certains sonorisés, jalonnent le parcours. Dès la fin du XIXè siècle, les opérateurs Lumière ont arpenté les territoires de l'empire français en extrême-orient. Le premier travelling arrière de l'histoire du cinéma (que l'on peut voir) aurait été tourné là-bas...

Les Français ont transportés sur place, en pièces détachées, des chaloupes canonnières de la classe Arc, idéales pour les fleuves où l'on ne peut pas virer de bord. On peut en voir une superbe maquette...

Si, en métropole, la présence française en Indochine a d'abord été discuté sur le fond (cf. Clemenceau) mais aussi sur la forme (il fallait voter ou non les crédits nécessaires ) puis à fait l'objet d'un consensus doublé d'une relative indifférence, les tenants de l'anticolonialisme sont montés au créneau dès les années 30. Une affiche grand format du Secours rouge international et une autre du Parti communiste français l'illustrent de manière assez édifiante.

A l'inverse les affiches de recrutement, dans l'armée coloniale (engagez-vous rengagez-vous) puis dans le corps expéditionnaire (engagez-vous) promettent une vie d'aventure et un statut social...Pour le repos du guerrier des "horizontales japonaises" (des "geishas" dont on a fait des cartes postales) ont été prévues.

Même si le système colonial légitimait la domination française et justifiait l'inégalité entre Européens et "indigènes", l'Indochine a effectivement accueilli de belles aventures individuelles. Celle par exemple du futur général Pennequin - le Monsieur Tonkin du nord-ouest (Galliéni étant le Monsieur Tonkin du nord-est) -, qui fut un colonialiste progressiste, apprenant à parler l'annamite et n'hésitant pas à contrevenir aux ordres de sa hiérarchie. Du reste tous deux "ne se faisaient aucune illusion sur l'avenir des possessions coloniales qui, pour eux, étaient appelées à reprendre leur indépendance un jour" (wikipédia).

A la suite de Pennequin, le gouverneur général Sarraut (1911-1913 et 1916-1919) réprime certes les troubles mais instaure aussi une nouvelle politique d'association des élites au pouvoir colonial. Il tente de réformer les institutions et développe l'instruction publique mais cette politique ne parvient pas à s'imposer et, surtout, elle ne s'accompagne pas d'une véritable ouverture politique.

S on ne le savait pas déjà on découvre, avec les images du camp retranché de Na San que Dien-Bien-Phu ne fut pas la seule cuvette entourée de crêtes...apparemment on n'en a pas tiré la leçon même s'il est vrai que Na San n'est pas tombé mais a simplement du être évacué...

En même temps que la conférence de Genève, où il a aussi été question de la situation en Corée et où sera présent un certain Molotov, s'est tenue sur place à Trung Gia une rencontre entre Français et Vietnamiens afin d'aborder de façon pratique les détails de l'évacuation.

A voir jusqu'au 26 février 2014.

Tag(s) : #Expos
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